Origine : Nivernais/Morvan (Grenant)
Année de l'arrangement : 2000


 

Faut casser glace et glaçons


  — Oh ! mariez-moi ma mère
Car je ne peux plus dormir !
bis
  Quand je crois de m'endormir,
L'amour vient, il me réveille,
Quand je crois de sommeiller,
L'amour vient me réveiller.
 

 

— Tu n'sais pas ce qu'il faut faire,
Ma petite Jeanneton

Faut casser glace et glaçons
Te baigner dans la rivière,
ça t'amortira tes feux,
Après tu dormiras mieux.

 

— Taisez-vous donc ma mère,
Vous étiez bien comme moi !

Vous étiez bien comme moi,
A quinze ans, v'aviez mon père,
Moi, j'ai bientôt dix sept ans,
J'vourais en avoir autant.

 

— Taisez-vous, grand' garçonnière,
Je n'vous ai jamais dit ça !

Je n'vous ai jamais dit ça,
Qu'à quinze ans, j'avais vot' père ;
J'avais bien quinze ans passés
Que j'y'avais jamais pensé.


Source : A. Millien - Chansons populaires du Nivernais et du Morvan, t. 1 page 368

 

Voir une autre version de ce chant :

Faut casser glace et glaçons (2) (Deux-Sèvres) n° 4335 page 217

Voici un texte de colportage imprimé vers 1750, qui pourrait être la source de ce chant,
et semble écrit par un semi-lettré :

N'est-il pas bien temps ma mère
De me donner un mari;
J'ai dix-sept ans et demi,
Accordez à ma prière,
Faites suivant mon désir,
Autrement je vais mourir.

Que me dites-vous, morveuse ?
Vous me surprenez fort,
Quoi vous seriez à la mort
Parce que vous êtes amoureuse ?
On ne finit pas ses jours
Pour avoir un peu d'amour.

Je souffre, je me chagrine
Si je ne vois point mon amant,
Je ne dors aucunement;
Vous le voyez, ah ma mère,
Dès que je veux sommeiller,
L'amour vient me réveiller.

Sais-tu bien ce qu'il faut faire,
Ma petite Jeanneton ?
Il faut prendre des glaçons,
Te baigner dans la rivière,
L'eau apaisera ton feu,
Après tu dormiras mieux.

Ma mère, dans votre jeune âge,
N'étiez-vous point comme moi ?
Vous m'avez dit qu'une fois,
Vous perdiez fort le courage,
Sans le secours de votre amant,
Vous étiez au monument.

Ah ! effrontée que vous êtes,
Osez-vous parler ainsi ?
Jamais je ne vous ai dit
De paroles indiscrètes ;
Car à l'âge de vingt ans
Je n'y pensois nullement.

Que dites-vous, ma chère mère,
Je crois que vous vous trompez,
Car vous êtes mariée
A vingt ans avec mon père ;
A l'âge de dix-sept ans,
Vous aviez des galants.

Allons, finis, garçonnière,
Je vais te casser le nez,
Tu vas être enfermée
Dedans un lieu sédentaire,
Où tu finiras ta vie
Pour m'avoir parlé ainsi.

Mon amant seul est la cause,
Que je verse tant de pleurs,
Il a gagné mes faveurs,
De tout déclarer je n'ose ;
Renfermez-moi avec lui,
Je vivrai là sans ennuis.

Je comprends bien ton langage,
Je ne suis pas étonnée
Je vois bien que tu as laissé
Aller le chat au fromage.
Malgré moi par ton esprit,
Tu vas avoir un mari.