Origine : Paroles Marc Legrand - Musique Victor Meusy
Année de l'arrangement : 2000

 

Les crapauds


1.
La nuit est limpide,
L'étang est sans ride,
Dans le ciel splendide,
Luit le croissant d'or.
Orme, chêne ou tremble,
Nul arbre ne tremble,
Au loin le bois semble
Un géant qui dort.
Chien ni loup ne quitte
Sa niche ou son gîte,
Aucun bruit n'agite
La mare au repos.
Alors, dans la vase,
Ouvrant en extase
Leurs yeux de topaze
Chantent les crapauds


2.
Ils disent : « Nous sommes
Haïs par les hommes,
Nous troublons leur somme
De nos tristes chants
Pour nous point de fêtes,
Dieu seul sur nos têtes
Sait qu'Il nous fit bêtes
Et non point méchants.
Notre peau terreuse
Se gonfle et se creuse :
D'une bave affreuse
Nos flancs sont lavés.
Et l'enfant qui passe
Loin de nous s'efface
Et, pâle, nous chasse
A coups de pavés

 

3.
Des saisons entières
Dans les fondrières,
Un trou sous les pierres
Est notre réduit.
Le serpent en boule
Près de nous s'y roule.
Quand il pleut en foule,
Nous sortons, la nuit.
Et dans les salades,
Pesants camarades,
Faisant des gambades
Nous allons manger.
Manger sans grimace,
Cloporte ou limace,
Ou ver qu'on ramasse
Dans le potager

 

4.
Nous aimons la mare
Qu'un reflet chamarre,
Où dort à l'amarre
Un canot pourri.
Dans l'eau qu'elle souille.
Sa chaîne se rouille :
La verte grenouille
Y cherche un abri.
Là, la source épanche
Son écume blanche :
Un vieux saule penche
Au milieu des joncs.
Et les libellules
Aux ailes de tulle
Font crever les bulles
Au nez des goujons.

 

5.
Quand la lune plaque
Comme un vernis laque
Sur la calme flaque
Des marais blafards,
Alors symbolique
Et mélancolique,
Notre lent cantique
Sort des nénuphars.
Orme, chêne ou tremble,
Nul arbre ne tremble,
Au loin le bois semble
Un géant qui dort.
La nuit est limpide,
Le ciel est sans ride
Dans le ciel splendide
Luit le croissant d'or » .

Source : 350 Chansons anciennes, n° 337, éd. de l'Atelier