Monuments

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g - Les églises

I - La délimitation et le choix de l'emplacement

Plusieurs légendes racontent dans quelles circonstances, souvent assez singulières, fut accordé le terrain nécessaire à la construction d'une église, d'un couvent et de leurs dépendances.
Quelques-unes rappellent le trait de la peau de bœuf coupée en courroies qui servit à délimiter l'emplacement de Byrsa, la citadelle de Carthage.
Mais il est rare qu'elles s'en rapprochent autant que la tradition suivant laquelle le comte de Cornouaille, ayant été soigné par saint Galonnek, lui concéda toutes les terres cultivables qu'il pourrait enfermer dans les lanières de sa robe déchirée pour panser la blessure, chaque lanière dût-elle n'avoir qu'un fil. Bien plus fréquente est la dotation comprenant seulement le terrain qui, dans un temps déterminé, sera cultivé ou clôturé :
un miracle permet aux saints de s'emparer d'un espace beaucoup plus grand que celui que les donateurs avaient l'intention de leur concéder.
L'évêque saint Faron ayant accordé à saint Fiacre toute l'étendue de la forêt qu'il pourrait, à lui seul, bêcher en un jour, celui-ci commença à ouvrir la terre avec une bêche, et voilà qu'à sa seule présence les arbres s'abattaient d'eux-mêmes pour agrandir la concession.

Les habitants de Diélette accordèrent à saint Germain, pour bâtir une église et ses dépendances, l'espace qu'il parviendrait à entourer d'un sillon de charrue avant le déjeuner;
il promena sur la terre son bâton qui creusait un sillon aussi profond que si le soc y avait passé.

Le seigneur de Landeleau ayant proposé à saint Teilo, pour sa paroisse, le territoire qu'il pourrait parcourir du coucher du soleil au chant du coq, le bienheureux monta sur un cerf, et eut ainsi une belle étendue de terrain.

Dans plusieurs légendes étrangères, la concession s'étend aussi loin que porte le son d'un instrument.

Lorsqu'il s'agit d'indiquer le lieu où sera construite cette église, le marteau, instrument caractéristique du maçon, intervient très fréquemment.
Saint Eloi et saint Georges qui voulaient bâtir une église exploraient séparément la campagne, chacun tenait à l'honneur d'en désigner l'emplacement.
Ils se rencontrèrent à mi-côte d'une colline au bord de l'Erve;
saint Eloi, trouvant la position excellente, proposa à son compagnon d'y édifier le nouveau temple.
Mais saint Georges n'y consentit pas; bientôt la dispute dégénéra en rixe, et saint Eloi, terrassé par le guerrier, demanda grâce.
Saint Georges s'empara du marteau du vaincu, le lança au loin et déclara que là où il tomberait on construirait l'église.
Il alla choir près de l'Erve, à un kilomètre de là, et les deux bienheureux y bâtirent l'église de Saint-Georges de l'Erve.

 

Le choix de l'assiette du sanctuaire est parfois déterminée par l'arrêt d'animaux qu'on laisse marcher à leur guise.
Sainte Noluenn qui, sous le nom de sainte Noyale, est révérée dans le Morbihan, ordonna à un laboureur d'atteler à sa charrette deux jeunes taureaux qui n'avaient pas encore subit le joug, et d'aller la charger de pierres à la carrière;
c'est à l'endroit où ils s'arrêteraient que devait être construit sa chapelle.

 

L'épisode de la destruction pendant la nuit des travaux exécutés en un jour, figure dans un grand nombre de récits.
L'église de Varengeville est à une des extrémités de la paroisse, sur la pointe la plus élevée de la falaise :
les habitants l'ayant démolie et apporté ses débris au milieu du village pour l'y reconstruire, saint Valéry, patron de la vieille église, transporta pendant une nuit toutes les pierres qu'on avait déjà charriées loin de la falaise et les remit en place.

La paroisse de N.-D. du Castel à Guernesey, qui est fort étendue, à son église sur les confins de celle de Saint-André :
on avait apporté tous les matériaux nécessaires à sa construction dans un champ assez central appelés les Fuzés;
mais en une seule nuit tout disparut, et fut trouvé le lendemain sur le site de l'ancien castel des Sarrasins;
les pierres ayant été reportées à l'endroit d'où elles avaient été enlevées, on les retrouva toutes, le matin, sur le champ du château.
Cela arriva par trois fois; on renonça à la bâtir en cet endroit, et elle s'éleva sans encombre à celui où on la voit aujourd'hui.

Dans une légende bretonne, le diable s'amuse à contrarier les projets de saint Maudet, qui bâtissait son monastère de l'île.
Une main invisible en renversait chaque nuit les murs;
l'abbé résolut de veiller, et il aperçut un loup en train de démolir le travail de la journée;
c'était le diable.
Maudet empoigna la bête par la queue et la jeta à la mer, et, depuis, la construction s'acheva sans encombre.

 

Plusieurs récits racontent que les pierres, sans intervention d'aucun personnage visible, quittent l'endroit où elles ont été déposées :
dans l'un d'eux la merveille semble avoir lieu en plein jour, et non, comme d'habitude, la nuit;
on avait apporté sur le mont Rupierre les matériaux destinés à l'église de Menil-Jean (Orne), mais quand les maçons eurent commencé leur ouvrage, pierres, sable, mortier et truelles se mirent en mouvement, et traversant la vallée, allèrent se poser sur la colline où on la voit.

 

Quelques fois les saints manifestent leur aversion pour l'endroit choisi par les fidèles en y envoyant des animaux importuns.
Les premières constructions du monastère de Neufons furent faites au Creux de la Fosse, parce que Neufons était malsain;
de nombreux oiseaux se précipitèrent sur les maçons et les charpentiers, et non seulement les empêchèrent de travailler, mais emportèrent dans leur bec et dans leur griffes de petits morceaux de bois à Neufons.

 

Suivant une conception ancienne, dont la vitalité est attestée par des exemples contemporains bien connus, des divinités en personne se montrent aux croyants pour désigner l'emplacement du sanctuaire où elles désirent qu'on vienne leur rendre hommage.
Dans l'Ain, la Vierge Noire des Préaux, comme celle de Mazière, au fond des immenses forêts de sapins d'Hauteville, sont apparues toutes deux dans un arbre s'entrouvrant, toutes deux ayant l'Enfant Jésus dans leurs bras et demandant une chapelle en ce lieu miraculeux.

 

Des légendes encore plus répandues racontent que des statues, trouvées miraculeusement, quittent l'endroit où la piété des fidèles les avaient déposées, pour se rendre à celui où elles veulent qu'on leur érige un sanctuaire.
Un ermite, qui avait établi sa cellule dans une forêt des Vosges, possédait une madone en bois grossièrement sculptée;
on cessa de le voir, et la statuette disparut en même temps que lui.
bien des années après, on la retrouva fortuitement dans le creux d'un arbre.
Les paroissiens de Fontenay-le-Château l'emportèrent processionnellement dans leur église;
mais la statuette retourna d'elle-même à l'arbre où elle avait été retrouvée, et elle y revint encore deux fois.
C'est alors que les habitants, jugeant que la Vierge désirait se fixer en ce lieu, résolurent de lui élever une chapelle.

Des pêcheurs, ayant ouvert une grande caisse en bois qui avait été jetée par les flots, sur la grève de Prunetta, y virent une Vierge qui paraissait animée, et était éclairée par quatre cierges que le vent ne pouvait éteindre.
Les habitants de Cervione la transportèrent en grande pompe sur le plateau en face de la ville, avec l'intention de lui ériger là une chapelle;
le lendemain elle était sur le sommet du pic voisin;
ils la descendirent, mais elle disparut de nouveau et alla se replacer sur le rocher.
Après une seconde descente, la Vierge remonta encore, et l'on se décida à construire à l'endroit qu'elle semblait avoir choisi.

Lorsque la statue de N.-D. de Brébières eut été découverte par les brebis qui s'engraissaient merveilleusement en broutant l'herbe qui couvrait la place où elle avait été ensevelie, on la porta solennellement dans l'église paroissiale d'Ancre;
le lendemain elle avait disparu, et on la retrouva dans un coin isolé de la ville, tout près de la rivière.
Rapportée à l'église trois fois, elle la quitta pour aller se placer à l'endroit où l'on construisit N.-D. de Brébières.

 

Parfois l'emplacement est indiqué par la neige tombée à un certain endroit;
la cathédrale de Liège fut bâtie sur le plan tracé par une pluie de neige tombée en juillet.

 

Un grand nombre de chapelles ou d'églises ont été construites à la suite de vœux faits par des personnages qui, grâce à des secours surnaturels, échappèrent à des dangers imminents.
Dans une enquête faite par un juge de paix archéologue pour une délimitation, des témoins lui dirent que le grand saint Martin se trouvait au Suc de la Violette, cheminant sur un grand âne noir, accompagné du chien qui ne le quittait jamais.
Tout à coup s'élance du bois un loup enragé qui eut en un instant dévoré le chien;
aussitôt après il se mit à déchirer l'âne.
Saint Martin, s'élançant vivement à terre, se mit à genoux pour implorer l'aide de Dieu, alors que le loup lançait sur lui des regards de convoitise.
Le moine fit alors vœu de construire une chapelle à l'endroit même où, fuyant, il pourrait s'arrêter en sûreté.
Aussitôt, il se sentit soulevé comme par une force mystérieuse, il lui semblait qu'un ange le tenait suspendu et l'entraînait au-dessus des eaux du lac de Forez, vers une île où il se trouva bientôt déposé.
C'est là qu'avec l'aide des pêcheurs convertis, il posa la première pierre d'une chapelle qui fut appelée église de Saint-Martin.

 

II - La construction

Ainsi que d'autres monuments, plusieurs églises ont été construites, en un espace de temps prodigieusement court, par des personnages légendaires.
La Vierge acheva d'elle-même, en une nuit, la chapelle de N.-D. du Bois-Béni, dont les travaux avaient été interrompus ;
un pèlerin, en état de grâce, la vit placer et maçonner les pierres que des anges lui apportaient.

Saint Valéry, mécontent de l'emplacement de son église à Varengeville, la reconstruisit aussi, avec l'aide des anges, en une nuit, sur la falaise où elle se dresse encore.

Ce sont surtout les fées qui bâtissent des églises avec la même rapidité :
elles élevèrent le clocher de Saint-Philibert à Dijon, et, non loin de là l'église des Premières;
il ne leur restait qu'une pierre à poser lorsque le jour les força à s'enfuir.

Mélusine, surprise par le chant du coq, ne put maçonner la dernière pierre de la chapelle de Ménigoute (Deux-Sèvres).
Les fées n'ont pas réussi à terminer avant minuit l'église de Jailly, et depuis on a vainement essayé de reprendre leur œuvre.

Les trois églises de Seffonds, de Blaincourt et de Doulencourt, dans l'Aube, qui ont des rapports frappants, ont été bâties en trois jours par trois fées qui étaient sœurs.
Elles se servaient d'une truelle enchantée qu'elles se passaient tour à tour et qui allait se placer dans leurs mains en traversant les airs.

Satan partage avec les fées l'honneur d'avoir bâti des églises qui, par leur beauté, semblent au-dessus du génie humain.

Le bourgmestre d'Aviotte, que sa femme tourmentait pour avoir une église, conclut un marché avec le diable qui s'engagea à parfaire, en une nuit, avant le chant du coq, une église qui surpasserait toutes celles de la contrée.
Satan se mit à l'œuvre, mais la femme du bourgmestre, ayant eut connaissance du pacte, se mit en observation, et quand l'édifice fut à peu près terminé, elle chassa son coq qui se mit à chanter, et Satan s'enfuit.
Il ne manquait à l'église qu'une seule pierre, mais on n'est jamais parvenu à faire tenir celle que l'on mettait pour combler la lacune.

Voici pourquoi l'un des clochers de la cathédrale de Senlis est inférieur à l'autre;
la construction en avait été confiée à deux frères, et chacun s'ingéniait à faire plus beau que l'autre.
L'un deux, s'étant aperçu que la base du clocher nord était plus large et plus belle que la sienne, creva les yeux de son rival pour l'empêcher de terminer son œuvre, et comme en effet il n'avait pas fait de plan, ce clocher ne put être fini;
en souvenir de ce crime, la cathédrale prend parfois des teintes de sang au coucher du soleil.

 

L'architecte chargé de reconstruire la chapelle de N.-D. de Caillouville (1331) s'étant trompé dans ses calculs, et voyant qu'il allait être ruiné, invoqua le diable;
celui-ci consentit à lui venir en aide , sous condition que l'architecte lui livrerai les âmes de deux de ses enfants le jour même où l'édifice serait achevé.
L'architecte eut des remords, et implora tous les saints, et en particulier saint Regnobert.
Le bienheureux touché de son repentir, vint le visiter et lui recommanda expressément de s'en tenir à la lettre du contrat et de ne pas agréer le travail du diable qu'il ne fut complet en tous point.
Lorsque Satan livra son œuvre et en réclama le salaire, l'architecte se mit à examiner la chapelle avec la plus vive attention; mais il ne pouvait y voir le plus léger défaut.
Eperdu, il cherche l'image de saint Regnobert; mais la statue est absente de la place d'honneur que Satan lui avait ménagée.
Le maître-maçon adresse au diable ses plus énergiques réclamations, et Satan affirme que, dés le lendemain, la statue sera remplacée.
Il tient parole; le saint de son côté ne manque pas de recommencer son manège.
Cela eut lieu tant de fois que le démon lassé abandonna de lui-même son droit.

 

Plusieurs traditions racontent l'assistance miraculeuse que des animaux envoyés par des saints prêtèrent à ceux qui s'employaient à leur service.
Une grande mule et deux bœufs blancs attelés à un char allaient chercher dans une carrière de la montagne les pierres destinées à l'église de Chamalières, et faisaient sans guide le voyage de retour.

Lors de la construction de l'église de Vèze, six vaches fournissaient clandestinement du lait aux ouvriers.

Trois chèvres suivies de leurs chevreaux venaient chaque jour nourrir de leur lait les trois maçons qui construisaient la chapelle d'Héas (Htes-Pyrénées);
au bout de trois ans, elle était presque achevée lorsqu'ils eurent la mauvaise idée de manger un des chevreaux;
mais à partir de ce moment elles ne reparurent plus.

 

Lorsque saint Julien bâtissait l'église de Bansat, il réquisitionnait tous les voyageurs qui traversaient cette localité.
Or des montagnards qui descendaient dans la Limagne, et devaient passer par Bansat, eurent recours à un stratagème pour s'en dispenser : l'un d'eux se coucha sur le char en faisant le mort;
lorsqu'ils arrivèrent devant la construction, saint Julien leur demanda de l'aider.
« Hélas, répondirent-ils nous le voudrions bien, mais notre compagnon est mort, et nous avons hâte de le reconduire chez lui. »
— « Prenez garde, dit Julien, que ce ne soit vrai. »
En effet, quand les montagnards eurent passé le village, ils s'aperçurent que leur compagnon était bien mort.

 

III - Le pourtour des églises

Le vent se fait sentir avec plus de violence qu'ailleurs dans les rues étroites qui longent les hautes constructions des églises et surtout des cathédrales, souvent bâties sur des lieux élevés, ou tout au moins peu abrités.
Nombre de légendes que l'on retrouve ailleurs qu'en France expliquent cette particularité par des causes naturelles, auxquelles se mêle d'ordinaire une pointe de satire.
Suivant le thème le plus répandu, c'est le vent personnifié qui y souffle pour se distraire d'une attente prolongée.
Le Vent et le Diable, qui parcouraient le monde ensemble, se trouvèrent un jour près de la cathédrale d'Autun, et le Diable, ayant appris que le chapitre était réuni et ne pouvait se mettre d'accord, dit à son ami qu'il voulait entrer pour rétablir la paix, et qu'il ne serait là qu'un moment;
il y est resté, les chanoines étant toujours en discussion, et le Vent qui s'ennuie souffle tout autour, relevant les robes et emportant les chapeaux.

Des personnages qui appartiennent au monde des trépassés, se manifestent dans le voisinage immédiat des églises rurales.
La plupart de celles qui sont anciennes ont été bâties au milieu du cimetière qui, dans beaucoup de petites paroisses, sert toujours aux inhumations.
Jusqu'à une époque récente, il n'était pas rare, en Bretagne surtout, de voir, adossé à l'un des bas-côtés, un édicule destiné à recevoir les ossements que le fossoyeur découvrait en creusant de nouvelles tombes : à travers une large baie garnie de barreaux, on apercevait
Les testes
Entassées en ces charniers

au-dessus des autres débris.
Suivant des croyances bretonnes, il leur était donné de recouvrer la parole lors de certaines fêtes :
dans le pays de Tréguier, elles devisaient entre elles la nuit de la Toussaint, et celui qui aurait assisté à leur conversation aurait été renseigné sur ce qui se passe de l'autre côté de la mort;
il aurait, en outre, entendu nommer tous ceux qui devaient trépasser dans l'année.
Un mendiant qui avait eu la curiosité d'écouter les colloques des morts des ossuaires du cimetière de Saint-Pol-de-Léon, situé à l'écart de la ville, mourut de peur en entendant dire que ce serait lui qui mourrait le premier.

Les hôtes de l'ossuaire semblent informés par des voies mystérieuses des événements qui les intéressent.
Une jeune fille qui avait parié d'aller la nuit chercher une tête de mort dans celui de Lancieux (C.-d'Armor), en stipulant que le prix de la gageure serait employé à faire dire des messes pour le repos de l'âme de celui auquel la tête aurait appartenu, vit, à son arrivée au charnier, toutes les têtes sauter autour d'elle, chacune s'efforçant de se placer sous sa main pour être emportée.

Le soir qui précéda le décès d'une dame de Servon (Ille-et-Vilaine), un homme qui sortait de l'église entendit les os du reliquaire s'entrechoquer et même sauter dans le cimetière;
le bedeau fut obligé de barricader le charnier et d'en attacher la porte avec des cordes.

Quelques récits racontent la punition de ceux qui ont manqué de respect aux ossements des morts, et surtout à leur tête;
un jeune bambocheur, pour faire peur aux gens y dérobe un crâne et l'invite, avant de l'y replacer, à souper le lendemain avec lui;
à l'heure dite, il voit entrer un squelette qui se met à table, va ensuite se coucher près de lui dans son lit, et le fait mourir de peur.

 

Les morts sortent parfois de leurs tombes pour se promener dans les cimetières.
Dans le pays de Tréguier les âmes en peine y font, la nuit de la Toussaint, des processions que sont obligés de suivre tous ceux qui viennent à y passer.

 

Les saints apparaissent parfois dans le voisinage de leur sanctuaire : en Basse-Bretagne, ils se montrent surtout près de ceux qui ont été détruits.
depuis qu'il ne reste que des débris de l'oratoire de saint Coulaouen à Brasparz, le saint, n'ayant plus où reposer sa tête, erre comme une âme en peine à travers les prés et les taillis du ravin;
des gens l'on rencontré, vêtu comme l'était la statue dans sa chapelle;
il rôde sans cesse autour des ruines de sa maison, suppliant qu'on la lui rebâtisse.

Au milieu des décombres de la chapelle de saint Anne à Plonéis, on entend comme le bruit d'un marteau frappant les pierres;
c'est la sainte demandant qu'on lui relève son sanctuaire.

 

Le rite qui consiste à faire un nombre de tours déterminés autour de l'objet réputé puissant, assez fréquent près des arbres ou des pierres, est aussi en relation avec les édifices sacrés.
Jusqu'en 1870, des femmes pour obtenir la grâce d'être mère le faisaient, parfois à genoux, à Notre-dame de Quelven, dans le Morbihan;
Il est encore pratiqué autour de la chapelle de Sainte-Marguerite à Collorec (Finistère) avant ou après le coucher du soleil, par des femmes dont la fécondité est en retard;
à chaque tour, elles rentrent dans le sanctuaire pour réciter cinq Pater et cinq Ave, puis elles touchent la statue de la sainte, le nombril à nu, se confessent et déposent une offrande.

Les nourrices dont les seins sont malades ou taris font, en invoquant saint Agathe, sept fois le tour de la chapelle qui lui est dédiée à Langon (Ille-et-Vilaine).

Celui qui souffre des maux d'oreilles, accompli trois tours autour de l'église Saint-Georges près de Spa, coiffé d'une couronne de fer très lourde et garnie de pointes.

A Dourgnes (Tarn), il fallait faire neuf fois le tour de la chapelle de Saint-Stapin avant d'aller mettre ses membres dans les trous guérissants.

A Berven (Finistère) on conduit, trois lundis de suite, les enfants à une chapelle dont ils font neuf fois le tour, et quand ce pèlerinage est fini, ils commencent à marcher.

 

L'usage d'offrir aux saints, pour se concilier leur bienveillance ou pour les remercier, un cordon de cire de la circonférence de la ville, s'applique aussi à leur sanctuaire.
Cette coutume est encore observée en Bretagne.
A Prat, le jour du pardon, on voit tout autour de la chapelle de Sainte-Anne, sous la corniche extérieure, d'immenses cordons de bougie qui en font plusieurs fois le tour.

 

Les ferrures du portail de certaines église sont l'objet de pratiques qui sont d'ordinaire en rapport avec l'amour ou la fécondité.
« Les jeunes filles remuaient le loquet de la porte de la chapelle de Saint-Nicolas, à Provins, en répétant cette formule :

Saint Nicolas, saint Nicolas,
Mariez vos filles et ne m'oubliez pas.
»

Vers 1820, on observait en plusieurs parties du Périgord une coutume apparentée :
« Lorsqu'une femme était stérile, elle allait en dévotion soit à l'abbaye de Brantôme, soit à la chapelle Saint-Robert ou à Saint-Léonard, et toutes celles qui étaient dans le même cas s'invitaient à assister à la messe.
Après la cérémonie, elles prenaient le verrou de la porte et le faisaient aller et venir jusqu'à ce que leurs maris les ramènent chez elles par la main avec l'appareil d'usage.
A Rocamadour, dans le Rouergue, elles se contentaient de baiser le verrou. »
Il est possible que, suivant l'hypothèse de Dulaure, les prêtres catholiques aient substitué à un culte priapique des objets qui blessaient moins la décence.

Dans la Gironde, on fait toucher aux enfants le verrou d'une église, le jour Saint-Fort, pour leur donner de la force.

Vers 1840, on allait, pour la guérison des ophtalmies, mettre le doigt dans un trou percé dans le vantail gauche de l'église Notre-Dame du Blanc (Indre), en mémoire du miracle de saint Genitour;
celui-ci portant sa tête dans sa main était venu frapper à la porte de l'église alors gardée par un aveugle, qui, lui ayant demandé qui frappait, lui répondit en faisant un trou dans la porte :

« Regarde, je suis saint Genitour »,

et les yeux de l'aveugle s'ouvrirent sur-le-champ à la lumière.

 

En Bretagne, où les furoncles sont appelés clous, il est d'un fréquent usage d'offrir au saint réputé pour les guérir, des clous de fer qui ne doivent être ni pesés ni comptés, et qui sont déposés au pied de la statue ou dans un trou du mur, ou même sur l'autel, comme à la chapelle de Saint-Laurent en Sion;
lorsque les pèlerins venus à cette intention la trouvaient fermée, ils les jetaient par les fentes de la porte ou par les fenêtres.


Suite…


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